Y A-T-Il des Romans Quebecois en Anglais? L'exemple de Barney's Version de Mordecai Richler.
Quebec Studies 2001, Fall-Winter, 32
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Publisher Description
A partir des annees 80, de plus en plus de litteraires et d'intellectuels du Quebec considerent, comme Simon Harel, que l'"identite quebecoise n'est pas la reconnaissance d'un destin stable et previsible dont des citoyens autochtones seraient les legataires, mais plutot une structure ouverte" (Harel 375). A la suite des grands projets nationalistes menes dans les annees 30, puis dans les annees 60 et 70, la litterature quebecoise d'aujourd'hui est certainement moins tenue qu'elle l'a ete par le passe de jouer un role dans ce qu' Anne-Marie Thiesse nomme la creation d'une identite nationale (Thiesse 1999). Au moment ou le "peuple" quebecois se definit moins que jamais par une langue, une culture ou une appartenance ethnique uniforme, le corpus de la litterature ecrite par des Quebecois ne peut plus se reconnaitre A lui-meme une forme de specificite par le role qu'il devrait jouer dans un projet politique souverainiste ou dans quelque autre forme de revendication extra-litteraire (linguistique, culturelle, memorielle, identitaire) que ce soit. Comme le remarque Pierre Nepveu dans L'ecologie du reel, la societe quebecoise, ses arts, et sa litterature sont desormais caracterises, non plus par une conscience de l'unite, de l'uniformite ou d'un devenir commun, mais tout "a la fois par un sentiment de l"apres' et par un eclatement du champ culturel" (Nepveu 1988, 9), ce qui, forcement, n'est pas sans transformer de facon draconienne la (ou les) maniere(s) avec laquelle (ou lesquelles) il nous est aujourd'hui possible d'apprehender, non seulement l'identite, mais aussi la litterature dite "quebecoise." Si nous sommes prets, avec Pierre Nepveu, a reconnaitre qu'en dehors du positionnement geographique "cette appellation [de litterature quebecoise] ne recouvre plus rien d'essentiel ou de substantiel" (Nepveu 1988, 14), il devient pour nous hasardeux de chercher rationnellement a configurer et A circonscrire un ensemble de ce que nous pouvons nommer la litterature quebecoise. Meme la langue francaise ne constitue plus, actuellement, un critere valable de selection. Malgre tout ce que semblable affirmation peut avoir de choquant pour des habitudes de pensee longtemps impregnees de protectionnisme culturel, (1) force nous est de reconnaitre qu'aujourd'hui la question posee par Laurent Mailhot en introduction a La litterature quebecoise depuis ses origines ("Un certain nombre de livres, ecrits en francais au nord des Etats-Unis, peuvent-ils trouver place en litterature?" [Mailhot 11]) ne caracterise plus un espace litteraire au sein duquel la majorite des auteurs ecrivent en francais, mais ou nous retrouvons egalement des textes majeurs ecrits, notamment, en anglais et en yiddish. Si, pour reprendre les tennes de Nepveu, nous acceptons de reconnaitre que le "mode d'etre" de la "conscience" quebecoise contemporaine se realise vraiment sur le plan de l'ouverture et de l'eclatement, il sera alors pour nous difficile--voire impossible--de restreindre legitimement la litterature issue de cette "conscience" aux seules oeuvres de langue francaise.