L'Ermite au masque de miroir

Au lieu d'appeler son livre du nom mal défini et équivoque de « roman », l'auteur l'aurait plus justement présenté comme un divertimento serio.
Divertissement, il l'est en ce sens que, commençant dans une de ces baraques de foire, sources d'illusions et d'émotions pour lesquelles Marcel Brion marque toujours une particulière dilection, il associe l'étrange, le cocasse et l'ambigu dans un mélange savoureux. Mais sérieux il l'est aussi, et d'une extrême gravité, puisque les deux personnages principaux, le collectionneur dîles et l'amateur de grottes, dont les voyages paraissent commandés par une futile fantaisie sont, à leur insu, à la recherche d'un absolu qui toujours les fuit, ou qu'ils fuient, et qu'ils découvriront, à la fin de leur quête, que l'aboutissement est le vide, pour l'insatiable navigateur, l'éblouissante lumière sur les hauts glaciers, pour l'explorateur des ténèbres.
L'apparent divertissement, conduit avec la magistrale virtuosité du conteur, à mesure que se démasque la haute réalité cachée derrière les simulacres du jeu, se résout, enfin, pour l'homme des îles et l'homme des grottes, en un authentique parcours initiatique où la destinée est impliquée jusque dans ses dimensions insoupçonnées.