Quete De Pouvior Avortee Dans La Guerre, Yes Sir‪!‬

Les quelques oeuvres canadiennes-francaises traitant de guerre ne peuvent se lire qu'en relation avec le contexte socio-culturel qui les a produites.(1) Mais qu'arrive-t-il quand, plusieurs decennies apres, un auteur qui n'a pas vecu la guerre fait revivre ce qui n'est plus d'actualite? D'une part, il faut reconnaitre que ce travail de rememoration, de reappropriation de la "memoire nationale" peut permettre une meilleure comprehension de ces conflits, un peu a la facon d'une psychanalyse qui ouvre l'acces au passe dans l'espoir de mieux vivre le present. D'autre part, il faut tenir compte que ces nouveaux recits, tout en revitalisant un temps revolu, derivent de la problematique de l'epoque qui les ont vu naitre, et s'y rattachent donc plus ou moins etroitement. Le discours de la periode off l'oeuvre a ete ecrite se surimpose sur le discours officiel de la guerre transmis par l'Histoire, interpellant ainsi l'interpretation. S'il est un texte romanesque qui requiert une telle approche, c'est, croyons-nous, La Guerre, yes sir! de Roch Carrier (1968), parce qu'il s'agit a la fois d'un best-seller et d'un grand classique de la litterature quebecoise qui, tout en mettant en scene la periode de la Seconde Guerre mondiale au Quebec, se rattache au nationalisme passionne de l'epoque de la Revolution tranquille, ainsi que par ses structures a l'ethnologie meme de la guerre et ses composantes masculines intrinseques. Cette etude d'inspiration bakhtinienne et girardienne permettra par la suite de degager certains aspects de la representation litteraire de la guerre, tant au Quebec que dans une perspective culturelle plus globale.