Souvenirs d'un musicien: précédés de notes biographiques écrites par lui même Souvenirs d'un musicien: précédés de notes biographiques écrites par lui même

Souvenirs d'un musicien: précédés de notes biographiques écrites par lui même

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A peine la tombe s'est-elle refermée sur les cendres d'Hérold, qu'elle s'entr'ouvre pour engloutir le chef de notre école, ce Boïeldieu dont chacun de nous sait les chefs-d'œuvre, dont tout le monde à pu apprécier l'immense talent. Certes, la perte est grande pour l'art, mais combien ne l'est-elle pas davantage pour l'amitié! La maladie à laquelle Boïeldieu vient de succomber l'avait fait renoncer à la composition depuis quelques années, et il y avait peu d'espoir que sa santé se raffermît au point de lui permettre de reprendre un travail dont la difficulté et la fatigue ne sauraient être comprises que par les compositeurs; mais si ses talents étaient perdus pour le public, ses nombreux amis, sa famille, dont il était l'idole, pouvaient espérer de jouir encore longtemps de sa société si douce, de son esprit si fin, si délicat, de sa causerie si attachante, de cette inépuisable bonté qui s'étendait sur tous ceux qu'il connaissait; car dans la haute position d'artiste où son talent l'avait élevé, Boïeldieu rencontra malheureusement plus d'un envieux, jamais un ennemi; on put bien en vouloir à son talent, jamais à sa personne.

La carrière artistique de Boïeldieu fut semée de peu d'incidents, ce fut une continuité de succès qui l'amenèrent insensiblement au premier rang: aussi sa biographie sera-t-elle fort courte, et n'offrira-t-elle, pour ainsi dire, que les dates de ses nombreux ouvrages; mais ayant été assez heureux pour être son élève, puis ensuite son protégé et son ami, je pourrai donner sur son caractère privé quelques détails bien chers à ceux qui l'ont connu, et précieux pour ceux qui n'ont pas ce bonheur.

Adrien Boïeldieu était né à Rouen en 1775. Il reçut ses premières leçons de musique d'un organiste de cette ville, nommé Broche. M. Boïeldieu avait conservé beaucoup de respect pour la mémoire de son premier maître, et n'en parlait jamais qu'avec vénération. Cependant je suis porté à croire que la reconnaissance lui fermait la bouche sur plus d'un détail peu favorable au vieil organiste: il passait généralement pour un homme brutal, assez médiocre musicien, mais en revanche très-illustre buveur; il maltraitait généralement ses élèves, et en particulier le pauvre Boïeldieu, en qui il n'avait pas su remarquer de dispositions pour la musique, et qui montrait au contraire une aversion assez prononcée pour la boisson. Or, comme, dans les idées du père Broche, l'un n'allait pas sans l'autre, il en tira une conséquence toute naturelle: c'est qu'un homme qui ne savait pas boire ne saurait jamais composer; aussi ne fonda-t-il pas de grandes espérances sur son élève.

Boïeldieu ne se découragea cependant pas, et à peine âgé de dix-huit ans, il essaya de composer un petit opéra dont un compatriote avait fait les paroles. L'ouvrage fut représenté à Rouen avec un tel succès, que de toutes parts, et le père Broche le premier, on conseilla au jeune Boïeldieu d'aller présenter son ouvrage à Paris. Notre jeune musicien partit donc, léger d'argent, riche d'espérance, avec une petite valise où sa garde-robe tenait moins de place que sa partition, toute mince qu'elle était.

Il s'opérait alors une espèce de révolution musicale à Paris. Le genre sombre était à la mode; Méhul et Cherubini étaient à la tête de cette nouvelle école, et les beautés harmoniques qui brillaient dans leurs ouvrages semblaient avoir aussi plus de prix auprès du public que les simples et naïves mélodies auxquelles Grétry et Dalayrac l'avaient habitué. Aussi ces deux derniers semblaient se donner à tâche de rembrunir leur genre pour se mettre à la hauteur des ouvrages à la mode alors, et Grétry n'avait écrit son Pierre le Grand et son Guillaume Tell, et Dalayrac sa Camille et son Montenero, que pour lutter avec l'Elisa et la Lodoiska de Cherubini, l'Euphrosyne et la Stratonice de Méhul, la Caverne de Lesueur, les Rigueurs du Cloître de Berton, et quelques ouvrages du même genre, d'auteurs moins célèbres.

Cette réaction vers la musique sévère et scientifique n'était guère favorable au pauvre jeune homme, ignorant presque les premières règles de l'harmonie et n'ayant pour lui que quelques idées heureuses, mais mal écrites et délayées dans une orchestration mesquine. Quinze ans plus tôt, son ouvrage eût été de mode à Paris, comme il l'avait été à Rouen; mais alors les partitions ne faisaient pas leur tour de France aussi vite qu'à présent, et les troupes de province, qui exécutaient fort bien les ouvrages peu compliqués de musique de Grétry et de Monsigny, n'étaient guère en état de servir d'interprètes aux mâles accents de Méhul et de Cherubini.

GENRE
Biography
RELEASED
2019
1 December
LANGUAGE
FR
French
LENGTH
314
Pages
PUBLISHER
Library of Alexandria
SIZE
666
KB

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