Les Dieux ont soif
Publisher Description
Le capitaine Mac Nee, plus généralement connu dans la marine écossaise sous le nom de capitaine Steelcock, était ce qu'on appelle un gaillard. Un charmant gaillard, mais un rude gaillard. Sa taille se composait de six pieds anglais et de deux pouces de même nationalité, ce qui équivaut, dans notre cher système métrique, à deux mètres et quelques centimètres. Fort élégant, impassible comme la statue de Nelson, aimant les femmes jusqu'à l'oubli des devoirs les plus élémentaires, Steelcock était un des rares hommes de la marine écossaise portant le monocle avec autant de parti pris. Les hommes du Topsy-Turvy, un joli trois-mâts dont il était maître après Dieu, prétendaient même qu'il couchait avec. Personne, d'ailleurs, dans l'équipage du Topsy-Turvy, ne se souvenait avoir vu Steelcock se mêler de quoi que ce fût qui ressemblât à un commandement ou à une manœuvre. Les mains derrière le dos, toujours élégamment vêtu, quelles que fussent les perturbations météorologiques, il se promenait sur le pont de son navire, avec l'air flâneur et détaché que prennent les gentlemen d'Édimbourg dans Princes-Street. Chaque fois que son second, un de ces vieux salés de Dundee pour qui la mer est sans voile et le ciel sans mystère, lui communiquait le 'point', Steelcock s'efforçait de paraître prodigieusement intéressé, mais on sentait que son esprit était loin et qu'il se fichait bien des longitudes et latitudes par lesquelles on pouvait se trouver.